Scrops! de Maëlig Duval

A l’occasion de la dernière masse critique Babelio « mauvais genres », j’ai eu la chance d’être sélectionnée pour recevoir un des derniers nés de Géphyre éditions : Scrops ! de Maelig Duval. Une autrice que j’ai déjà eu l’occasion de lire l’année dernière avec La légende des plumes mortes et que j’étais ravie de retrouver.

Aux tréfonds de la galaxie, sur l’artificielle Physis, quelques milliers d’humains vivent selon les sages préceptes du Grand Puckman, fondateur de leur colonie. Depuis des générations, ils se félicitent de l’harmonie ainsi créée avec leur planète-fille. Mais quand disparaît Madeline, qui savourait jusque-là une retraite tranquille auprès de son second mari, un complotiste répète à qui veut
l’entendre qu’elle a été mangée par les scrops. Les scrops ? Ces adorables boules de poils, meilleurs amis des enfants, au bec tout doux et aux petits cris attendrissants ? Non, impossible. Physis, planète si adorable, avec son herbe bleue et ses poulets de compagnie, ne peut les avoir créés pour faire du mal, n’est-ce pas ?

Tout commence par une idée folle, qui avec le temps et l’argent, devient un projet possible et même réalisable. C’est ainsi que Will Puckmann réalise son rêve d’enfant : créer une nouvelle planète et la rendre habitable pour l’homme. Un projet fou qu’une poignée de scientifiques (fous aussi ?) vont suivre en s’embarquant à bord de l‘Oiseau Bleu, direction l’espace fort fort lointain. 

Une belle entrée en matière, curieuse et attrayante et cependant ce n’est pas la naissance de Physis (nouvelle planète, toute belle, toute fraiche) que nous allons suivre mais la vie des colons humains qui vont s’y installer. Nous voici plusieurs générations après le départ de la Terre, nous suivons les premiers colons à vivre sur Physis. Des colons qui doivent lutter pour vivre sur cette nouvelle planète qui s’offre à eux. C’est un choix : embrasser l’inconnu ou vivre des restes de la civilisation terrienne qu’ils ont emmené avec eux.

Nous lui permettons de prospérer et elle nous aide à grandir.
Équilibre et harmonie
Nous l’avons fait naitre et elle nous apprend à renaitre
Équilibre et harmonie
Physis, tu nous permets de vivre.
Nous te rendrons nos corps.
Nous nous fondrons en toi
Car tu emplis nos cœurs d’une gratitude infinie

Une récit sur la colonisation et l’adaptation

Cette entrée en matière que nous propose Maelig Duval ne dure que quelques pages mais son rythme, son phrasé, ses descriptions emportent littéralement le lecteur dans cette nouvelle contrée où l’herbe est bleue. Une très belle plume qui nous permet une visualisation claire en très peu de mots et qui m’a tout de suite accroché au récit.

Scrops! est un récit sur la colonisation. On y trouve les ingrédients d’une nouvelle civilisation en pleine construction : une idée utopique de la vie en communauté et une recherche d’équité et de vie symbiotique avec leur nouvelle planète alors que les humains se retrouvent confronter à une réalité dure et parfois incompréhensible. Une civilisation végétarienne (les grands mammifères ne sont pas adaptés sur Physis), une vie communautaire (on ne choisit pas où l’on habite) et des enfants à qui on offre un scrop de compagnie ! Les scrops semblent être la première espèce animale originaire de Physis, ce sont les dignes héritiers des lol cats, trop choupinou, tout doux et qui roupicoulent sans modération. Mais sont-ils vraiment aussi inoffensifs qu’ils semblent l’être ?

La petite bête tourna la tête vers lui. Alexis se trouvait à ce moment assez près pour distinguer ses bras sans articulation au bout desquels s’agitaient des mains minuscules. Assez près également pour deviner la douceur de son pelage coloré. Et remarquer avec émotion trois mamelons roses lovés au creux de ces poils accueillants.
La bête cligna de ses grands yeux et fit :
– Roupicou-roupicou !

Des personnages touchants et réalistes

On a l’impression d’assister à une gigantesque expérience scientifique, le petit coté sectaire en plus, ce qui donne une impression de téléréalité dont peut se régaler le lecteur. Scrops! est une fenêtre SF sur une humanité en transformation avec des personnages diversifiés et touchants que l’autrice nous décrit sans filtre ni concession : Madeline l’ambitieuse, Victor le passif, Geneviève l’incomprise ou Sabine la futée. Tout comme dans La légende des plumes mortes, Maelig Duval nous propose une galerie de personnages réalistes et qui donne un petit coté doux amer au récit.

Un récit barré et efficace

Le ton est sérieux et le rythme du récit soutenu. Une fois cette novella commencée on a un mal fou à s’arrêter. L’autrice joue très efficacement entre le mystère, la recherche de vérité et les travers de chaque individu. Maelig Duval en profite également pour développer des thèmes allant de l’acceptation de soi à l’ambition des parents pour leur enfants, ou la dépendance. Un concentré de vie en 150 pages, prenant. C’est une très bonne novella de SF, un récit inattendu qui par certain moment m’a rappelé La controverse de Zara XXIII de John Scalzi pour son coté parfois complètement barré et le premier livre de la série La romance de ténébreuse de Marion Zimmer Bradley pour l’adaptation forcé de l’humanité à la vie sur une nouvelle planète.

Au final, j’ai beaucoup aimé ce récit. J’avais déjà apprécié la plume de Maelig Duval avec La légende des plumes mortes mais je trouve Scrops! encore plus abouti et très bien maitrisé. Un court récit de SF sur la colonisation et sur l’humanité qui mêle mystère et enquête, un beau mélange qui en fait un livre dur à lâcher avant la fin. Une belle découverte pour moi, je suis franchement ravie de ma lecture 😉

6 commentaires

  1. Oh, vile tentatrice !
    Je viens même d'aller voir sur le site de l'éditeur pour voir si il existait en ebook, ce qui n'est pas le cas…

    • Oui je sais… la comparaison avec Scalzi fait toujours son petit effet 😉
      J'ai demandé et la version numérique arrive bientot !

    • Cool, merci. Je te laisse le soin de me faire la piqure de rappel !

  2. Quelle richesse dans cette novella! La pluralité de thèmes et les points positifs que tu soulèves ont attiré mon attention!

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