Perles de Chi Ta-wei

Quelque fois j’aime me lancer dans l’inconnu littéraire et découvrir de nouveaux horizons. J’avais entendu parler de Membrane de Chi Ta-wei sans avoir l’occasion de lire ce roman de SF queer de l’auteur taïwanais. Lorsque qu’un autre livre de l’auteur est paru aux éditions de l’Asiathèque, j’ai sauté sur l’occasion de découvrir cet auteur de SF atypique. Perles de Chi Ta-wei n’est pas un roman mais un recueil de six nouvelles étonnantes.

Les perles d’un des auteurs phares de la scène SF du monde chinois.

Un nouveau livre de Chi Ta-wei. Une foule d’êtres insolites, sirènes, faunes, androïdes, mangeurs d’insectes, enquêteurs intergalactiques, rôdent dans les pages de ce recueil de nouvelles. Avec son écriture expérimentale mais toujours sensible, Chi Ta-wei invente des mondes à venir qui, tout en ressemblant étrangement au nôtre, révèlent les poisons qui le rongent et s’efforcent d’en trouver les antidotes. Après Membrane, roman de science-fiction puissant et poétique sur les mutations du corps et de la mémoire, il interroge ici les dérives de nos sociétés techniciennes et la normativité de nos identités.


Chi Ta-wei (né en 1972) est l’une des voix singulières de la littérature mondiale de l’imaginaire. Il est l’auteur de plusieurs romans et nouvelles fantastiques et de science-fiction. C’est une figure importante des mouvements de défense de la cause homosexuelle sur l’île de Taiwan. Membrane (publié en français par L’Asiathèque en 2015 et par Le livre de poche en 2017) est considéré comme le premier roman « SF queer » de langue chinoise.

Ce recueil est composé de six nouvelles ayant majoritairement été écrites dans les années 90 sauf, Perles, la première nouvelle spécialement écrite pour la publication du recueil. Chi Ta-wei nous offre des nouvelles à l’aspect expérimental qui interroge sur les transformations de la sexualité, du genre, de la famille ou des corps. Naviguant de la Science-Fiction au Fantastique, l’auteur bouscule le lecteur en imaginant l’évolution de nos sociétés, des règles régissant les relation sociales et des personnes. Résolument étrange et intrigant, dans ce recueil Chi Ta-wei manie les références littéraires pour mieux les détourner fort notamment de son doctorat en littérature obtenu à UCLA. J’ai particulièrement apprécié la manière dont il transforme les normes de la société et expérimente sur ces changements.

Perles

Nouvelle de SF particulièrement troublante. Le monde de Gros Ours et de Petit Lapin est à la fois une énigme pour le lecteur et une fascinante transformation des normes sociales que nous connaissons, notamment celles de la famille. Alors que l’on pense au début à un texte sur un premier contact, puis à un récit Post-Apo, on découvre un texte sur les relations amoureuses. Un récit qui questionne sur les liens humains et les normes de la famille. Singulière dans sa forme, cette nouvelle est particulièrement touchante.

L’après-midi d’un faune

Un texte aux allures plus classiques qui se place aux frontières du Fantastique et du conte. L’auteur y parle de folie, de la transformation des corps et de l’altérité du soi. Une descente aux enfer sur fond de questionnement moral qui pourrait rappeler certains textes d’Edgar Allan Poe.

La guerre est finie

Avec cette nouvelle on rebascule du coté de la Science-Fiction. Androide, station spatiale et relations humaines au programme d’un texte plein de sensibilité et de pudeur. La guerre est finie est le texte du recueil que j’ai préféré. Chi Ta-wei nous parle de nouveau de transgression sociale mais aussi de recherche du bonheur pour les êtres artificiels. C’est un beau texte sur la découverte de soi.

Eclipse

Tout comme dans Perles, l’auteur dessine dans cette nouvelle d’anticipation un univers dense où les apparences sont trompeuses. Il questionne sur la place d’une personne différente dans la société quand celle-ci ne le reconnait pas. J’avoue avoir beaucoup moins apprécié cette nouvelle qui m’a laissé dubitative.

Au fond de son œil, au creux de ta paume, une rose rouge va bientôt s’ouvrir

Une nouvelle de Science-Fiction qui flirte avec le polar et la mythologie grecque. Étonnant mélange des genres et récit écrit à la seconde personne, cette nouvelle pleine d’émotions questionne de nouveau sur la transformation des relations humaines et jusqu’à celle des corps.

La comédie de la Sirène

Une réécriture du conte d’Andersen « La petite sirène » à la limite du pastiche. Une nouvelle fois l’auteur joue sur les a priori en détournant et interrogeant le lecteur sur sa vision de ce classique de la littérature.

Perles de Chi Ta-wei est une expérience de lecture. La découverte d’un auteur qui interroge sur les transformations de la société sur celle des corps et des relations humaines. Le terme expérimental me semble particulièrement adapté mais la plume de l’auteur n’est pas absconse pour autant. Les nouvelles de ce recueil jouent souvent sur les métaphores pour aborder des thèmes chers à l’auteur et j’ai aimé l’émotion et la pudeur qui se dégage de ces récits.

10 commentaires

  1. Je ne suis pas sûr de le lire un jour, les thématiques ne me parlent pas vraiment, mais c’est vraiment bien que ce genre de livre – de l’imaginaire expérimental taïwanais quand même ^^ – arrive jusqu’à nous. Ça t’a donné envie de lire « Membrane » ?

  2. Je l’ai vu passer de loin ce recueil et de ce que tu en dis, ça pourrait me plaire… « de l’imaginaire expérimental taïwanais », ça m’interpelle ! 😀

  3. Si je l’aperçois à la médiathèque, pourquoi pas, c’est bien aussi de se laisser aller à la découverte, format court en plus.

  4. Tu n’as pas complètement accroché si j’en crois ta note ? Je ne suis pas sûre de vouloir lire des nouvelles de Chi Ta-Wei, mais Membranes est un roman génial.

    • Disons que ça reste une lecture expérimentale pour moi. J’ai beaucoup aimé certaines nouvelles un peu moins d’autres, d’où une note qui peut paraitre un peu basse mais j’ai beaucoup aimé découvrir l’auteur et j’aimerai à l’occasion lire membrane 🙂

  5. C’est assez expérimental en effet. Comme toi je suis contente de l’avoir lu, ça ouvre d’autres perspectives même si ce n’est pas forcément un coup de foudre. Je pense que j’avais plus apprécié Membrane mais c’était peut-être plus facile d’apprécier un texte un peu plus long.

    • Il faudra que je lise Membrane je pense mais je suis d’accord avec toi ce recueil n’est pas un coup de foudre mais une expérience franchement interessante. J’aime aussi ce genre de découverte de temps en temps.

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