Voici une chronique qui fut dure à écrire. Quand un roman est aussi dense que La forêt sombre de Liu Cixin, c’est difficile pour moi d’arriver à classer mes idées pour vous expliquer mon sentiment sur ma lecture et le ressenti que j’en ai eu. D’autant plus dur je dirai que le Problème à trois corps (tome 1 de la trilogie) avait été un gros coup de cœur.
Avant que vous alliez plus loin dans cette chronique, sachez que si vous n’avez pas lu le tome 1, cette chronique va vous le spoiler complètement ! Ce n’est pas une volonté délibérée de ma part mais impossible de vous parler de ce tome sans spoiler le premier… donc si vous avez l’intention de lire cette trilogie, je vous dirais juste que oui j’ai beaucoup aimé cette suite, ce n’est pas un coup de cœur comme le premier tome mais wouah… quel univers !
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La forêt sombre de Liu Cixin paru chez Actes Sud |
L’humanité sait qu’il lui reste quatre siècles avant que la flotte
trisolarienne n’envahisse le système solaire. Les sciences fondamentales
se retrouvant verrouillées par les intellectrons, la Terre doit se
préparer du mieux qu’elle peut. Le Conseil de Défense Planétaire lance
un nouveau projet : le programme « Colmateur », qui consiste à faire
appel à quatre individus chargés d’envisager des stratégies secrètes
pour contrer l’invasion ennemie. Car s’ils peuvent espionner toutes les
conversations et tous les ordinateurs humains grâce aux intellectrons,
les Trisolariens sont en revanche incapables de lire dans leurs pensées.
Le récit reprends tout de suite après la fin du Problème à trois corps. L’arrivée de la flotte trisolarienne d’ici quatre siècles est avérée et ce deuxième tome est en fait un immense compte à rebours qui nous conduit vers l’arrivée des trisolariens dans le système solaire. Bien que les sciences fondamentales soient bloquées par les intellectrons, l’humanité commence à s’organiser pour affronter cette menace sans précédent. De la création du Conseil de Défense Planétaire, à celle d’un nouveau corps d’armée en passant par le redéfinition des priorités pour la recherche, l’humanité entre dans une ère de son histoire où la plus grande menace perceptible est le défaitisme et l’individualisme. A situation quelque peu désespérée, le CDP a également lancé le programme « Colmateur ». Quatre individus choisi parmi la population et qui sont chargés de développer des stratégies uniques et originales que seul eux doivent connaitre. Car les intellectrons épient tout et savent tout. Les colmateurs doivent donc travailler sur leurs projets respectifs en étant les seuls à le connaitre pleinement et ceci avec des pouvoirs et des moyens presque illimités.
Taylor garda le silence, le laissant parler.
– Et pour ce qui est de Seldon, son plan aussi était impossible.
Taylor poussa un long soupir et se rassit à coté du lit :
– Pour parler ainsi, vous avez dû lire la suite de la première trilogie.
Le vieillard surpris Haussa les sourcils :
– Non, je ne l’ai pas lu, c’est simplement ce que je pense. Alors le plan Seldon finit lui aussi par échouer ? Si c’est la cas, l’auteur est un homme exceptionnel. Moi qui croyait que l’histoire se terminée par une fin heureuse. Qu’Allah le bénisse.
– Asimov est mort depuis des années.
Le premier tiers de La forêt sombre a un rythme assez lent et l’action y est présente avec parcimonie. Liu Cixin prend cet espace pour nous présenter les personnages marquants de ce deuxième tome. Il nous permet de les rencontrer, de les côtoyer et de nous faire une première idée sur eux. Même si ce n’est pas la partie la plus passionnante, il faut avouer qu’elle place très bien le décors et notamment l’état d’esprit des hommes et son évolution depuis l’annonce de la guerre à venir. Dans le tiers suivant, l’histoire prend un rythme plus soutenue et on finit par avoir du mal à lâcher le livre dans le dernier tiers.
Le centre du récit est placé sous le signe de « l’état d’esprit » des populations au fur et à mesure de l’identification de la flotte trisolarienne et de ses intentions. L’auteur donne d’ailleurs beaucoup d’importance ici à la psychologie, de celle de l’individu à celle des populations, c’est « cet état mental » qui est le fil rouge de toute l’intrigue. Les commissaires politiques de l’armée tiennent d’ailleurs un rôle central dans la création de la nouvelle flotte spatiale car la pire crainte des états majors est le défaitisme.
Le défaitisme au sein des troupes se manifeste principalement sous les formes suivantes :
Premièrement, un manque d’ardeur : ceux qui considèrent leur engagement dans l’armée spatiale comme un travail ordinaire. […] ils manquent d’enthousiasme et de sens du devoir et doutent du sens ultime de leur travail.
Deuxièmement, une attente passive : ceux qui sont persuadés que l’issue de la guerre dépendra des scientifiques ou des ingénieurs ; […] ils ne saisissent pas très bien l’importance de leur tache routinière de formation militaire, manquant cruellement d’esprit d’initiative.
Troisièmement, des fantasmes irréalistes : ceux qui exigent de pouvoir profiter de la technologie d’hibernation pour traverser quatre siècles et prendre part à l’ultime bataille. […] En surface, cela peut sembler une attitude enthousiaste, mais en réalité c’est une autre manifestation de défaitisme, …
C’était déjà un peu le cas dans le tome 1 mais clairement avec ce tome 2, Liu Cixin navigue à la limite de la Hard SF sans jamais totalement s’y laisser prendre. La forêt sombre reste, je trouve, un livre exigent mais tout de même plus abordable que les livres de hard SF pure. Mon seul problème reste les noms des différents personnages qui sont chinois et j’avoue que j’ai eu du mal, au début, à reconnaitre les noms de chaque personnages. Mais au fur et à mesure, on s’y habitue.
Ce qui me plait particulièrement dans cette trilogie c’est la culture orientale de l’auteur qui ressort dans toute l’évolution du livre aussi bien dans le déroulé de l’histoire que dans la psychologie des personnages. Je n’ai eu que rarement l’occasion de lire des livres qui ne soient écris ni par des français ni par des anglo-saxons. Ici, le dépaysement est important mais c’est ce qui rend le récit plus intriguant et surprenant. Clairement j’ai navigué dans un espace qui m’était étranger sans toutefois m’y sentir perdue. Je trouve la performance assez incroyable de créer des personnages peu sympathiques au premier abord mais d’arriver à ce que le lecteur s’intéresse tout de même à leurs devenirs. Il y a des auteurs qui n’y arrivent pas du tout mais là, on reste scotché à nos deux personnages principaux jusqu’à la fin et peu importe ce que l’on peut penser de leurs actions.
Le gros point positif de La forêt sombre est que, comme dans Le problème à trois corps, Liu Cixin nous ménage un beau suspense qui ne prendra fin que dans les toutes dernières pages. Vous avez une idée vous de ce qu’est cette « Foret sombre » ? Moi je ne me suis pas doutée de la réponse avant de l’avoir sous les yeux… Je dirais également que la qualité de cette traduction chinois – français fait beaucoup pour la fluidité du récit et pour nous donner un très beau rendu.
Au final, Liu Cixin nous propose un deuxième tome un peu moins addictif que le premier mais qui fait évoluer son récit de manière très convaincante. Le fait de flirter avec la Hard SF apporte un contenu dense et l’intrigue évolue de manière très convaincante, ce qui en fait un récit de SF de premier plan ! J’ai été surprise par le tome 1, je l’ai été d’une autre manière par le tome 2 et je n’attends qu’une chose : que le tome 3 nous apporte une conclusion à la hauteur de ce grand récit de SF contemporain.
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Je n'ai pas totalement lu la chronique pour le spoil bien sur, même si pour l'instant je n'ai même pas encore le premier dans ma PAL 😛
Mais je compte bien y jeter un coup d'oeil un jour ^^
Je te le conseil, c'est vraiment une trilogie de SF qui change de ce que j'ai lu jusqu'ici 😉
Je ne suis pas sur de poursuivre l'aventure. Autant j'avais adoré le premier mais la fin m'avait un peu déplu. Du coup j'ai peur que ce second opus reprenne sur des mauvaises bases (pour moi) et que je n'adhère pas.
Effectivement si tu n'as pas aimé la fin du tome 1, je ne suis pas sure que ce tome 2 soit à ton gout… Bon perso, j'ai aimé ce tome 2 même si je le trouve un cran en dessous du tome 1.
Je pense que je vais faire l'impasse et rester sur une bonne impression. 😉
Il faudrait vraiment que je prenne le temps de découvrir cet auteur !!
Une de mes meilleures découvertes SF de ces dernières années 😉
Je ne connaissais pas, je ne suis pas une grande amatrice de SF, mais tu me donnes super envie de tenter malgré tout !