J’ai l’impression d’enchainer les chroniques coup de cœur en ce moment mais il faut dire que le mois de Juin a été particulièrement riche en lectures qui ont tout déchiré et au final c’est quand même le pied de pouvoir vous conseiller des lectures auxquelles je pense toujours plusieurs semaines après les avoir fini. Dans cette chronique je veux vous parler de Dévolution de Max Brooks. 14 ans après l’excellent World War Z, Max Brooks était très attendu pour ce nouveau roman (au moins par moi) et franchement j’ai pas été déçue.
Bienvenue à Greenloop, près de Seattle, petite communauté écolo privilégiée permettant à des ultra-riches de vivre au plus près de la nature, mais avec une technologie de pointe. Quand un proche volcan entre en éruption, Greenloop est soudain coupée du monde, et ses habitants jetés dans une épreuve de survie au jour le jour.
Kate Holland relate dans son journal intime comment son petit coin de paradis devient un enfer, surtout quand s’abat sur les survivants un prédateur inattendu : le Bigfoot. Pour survivre, la communauté doit désapprendre tout ce que le monde moderne lui a inculqué. Entre le journal de Kate et les nombreux témoignages extérieurs, nous reconstituons une ahurissante histoire de survival horror.
Bienvenue à Greenloop !
Communauté écolo chic basée sur la technologie et son utilisation dans le respect de l’environnement, Greenloop a tout du petit paradis pour riches voulant vivre proche de la nature mais avec toute le confort que la technologie moderne peut procurer. Kate Holland et son mari sont les derniers arrivés dans cette petite communauté d’une douzaine de personnes. Kate tente de s’adapter à cette nouvelle vie alors que son couple bat de l’aile et qu’elle se sent mal à l’aise dans ses relations avec les autres, c’est à travers son journal thérapeutique que le lecteur découvre ce qu’il est advenu de la communauté suite à l’éruption du Mont Rainier.
Avec Dévolution, Max Brooks tente nous refaire le coup de WWZ : prendre un sujet vue et revu et y insuffler de la nouveauté. J’avoue, j’étais septique au départ même en ayant tellement adoré son précédent roman. Le mythe du Bigfoot s’est non seulement pas nouveau mais en plus c’est un mythe qui ne m’attirait pas plus que ça, surement parce que je l’ai toujours trouvé mal traité. Mais Max Brooks étant Max Brooks, je me suis laissée tenter par ce nouveau roman. WWZ était (presque) moins un roman qu’un recueil de nouvelles sur la guerre contre les zombies. Un recueil de témoignages permettant de retracer la guerre et la façon dont elle avait été vécue à travers le monde. Dans Dévolution, Max Brooks choisit une formule un peu différente tout en restant dans le thème du témoignage : c’est le journal intime de Kate Holland retrouver dans les décombres du villages, les interviews du ranger-chef Joséphine Schell et de Franck Mc Cray Jr (le frère de Kate) qui constituent ce récit. Ce roman se présentent comme le travail de recherche d’un journaliste sur la catastrophe bizarre dans la catastrophe géante. Je suis absolument fan de ce genre de construction qui mélange les points de vue et les temporalités pour former le panorama complet des évènements, surtout quand c’est construit de manière intelligente
Bigfoot détruit un village. Voilà le titre d’un article qu’on m’a envoyé peu de temps après l’éruption du mont Rainier. J’ai pris ça pour un spam, conséquence inévitable de toutes mes recherches en ligne. A l’époque, je terminais un énième papier sur Rainier, l’analyse exhaustive de ce qui aurait dê être une catastrophe prévisible – et globalement évitable.
La découverte de la communauté de Greenloop via le journal de Kate, celle de la catastrophe de l’éruption du Mt Rainier via l’interview de ranger-chef puis celle de la disparition de Kate à travers l’interview de son frère, composent les chroniques d’une catastrophe. Le Mt Rainier entre en éruption, une éruption explosive du type de celle du Mt St Helens. Les équipes de secours sont débordées par l’ampleur de la catastrophe et, tout comme à la Nouvelle Orléans en 2005, vont mettre plusieurs jours à atteindre les zones les plus touchées et des semaines à secourir toutes les personnes qui se sont retrouvées coincées lors de la catastrophe. Imaginez alors une petite communauté entièrement dépendante pour la vie quotidienne des techniciens, drones et autres service de sécurité se trouvant à plusieurs kilomètres d’elle, tout d’un coup devenus inatteignables après la catastrophe. Pas d’internet, pas de téléphone, c’est le début de l’automne et personne n’a de moyen de communication ou suffisamment de nourriture pour tenir plusieurs semaines coupés de tout.
Pourquoi auraient-ils eu besoin d’un téléphone satellite ou d’une radio bidirectionnelle ? Ce genre de technologie, c’est utile quan on est entièrement coupé du monde, mais ce n’était pas du tout le cas ici. L’intérêt de Greenloop était que ses résidents avaient le même accès internet que n’importe qui dans l’Upper East Side de Manhattan. Mieux, même. En tant que communauté de télétravailleurs, il fallait justement avoir la connexion la plus rapide, la plus sûre possible, surtout quand on connait les conditions météo dans le Nord-Ouest Pacifique. Les données de toute la communauté passaient par de solides câbles en fibre optique. Et pourquoi, comment, ce câble pouvait-il tomber en panne ?
C’est là que Max Brooks montre de nouveau tout son talent en nous proposant une critique de la société vantant l’écologie et le retour à la nature mais qui ignore comment survivre dans une nature souvent hostile. En plus de cette critique sociétale qui sonne affreusement juste, Max Brooks nous propose un récit fantastique horrifique qui tient en haleine le lecteur et fut pour moi un véritable page-turner. Addictif, prenant, avec des personnages qui se découvrent au fur et à mesure que la situation à Greenloop se modifie, nageant entre déni et instinct de survie, j’ai trouvé ce récit complètement fascinant. L’auteur a un regard acéré sur la société et certaines de ses dérives. La vision d’une écologie complètement déconnectée de la réalité au point de nier tout instinct de survie est dérangeante mais de voir également des personnes se révéler devant l’adversité est assez jouissif. Les personnages imaginés par l’auteur sont touchants, énervants et assez monstrueusement crédibles. C’est le regard de Max Brooks sur la société et sur le comportement humain qui, une fois de plus, a fait mouche avec moi.
Vous l’aurez compris j’ai adoré ma lecture et d’autant plus que plusieurs semaines après, je repense encore à ce récit et à ce que l’auteur a voulu mettre en avant de contradictions de nos sociétés modernes où la survie arrive à ne même plus entrer en ligne de compte quand on parle de vivre en pleine nature. Dévolution est un récit intelligent qui touche juste sur beaucoup d’aspects humains et qui, en plus, propose une intrigue solide et haletante. Pas aussi puissant, il est vrai, que WWZ mais pour moi une vraie réussite tout de même, le tout avec un sujet qui à la base ne me parler pas du tout. Max Brooks s’inscrit pour moi définitivement dans les auteurs incontournables que j’aurais plaisir à lire de nouveau.
Woaw quelle chronique. Alors même que le pitch ne m’attirait PAS DU TOUT, tu as réussi à me convaincre de faire fi et de me noter ce titre dans la catégorie « à lire: valeur sûre » ^^
[…] Chronique : Dévolution de Max Brooks […]
J’ai pas trop envie d’un roman catastrophe, mais je note quand même, merci !
Ah c’est peut être pas un livre pour toi alors 😅
[…] que j’ai beaucoup aimé notamment pour la réflexion qu’il propose sur notre société : Dévolution de Max Brooks. Excellent auteur que je ne peux que vous encourager à […]